Carte de la seconde campagne Nectalis 2
Jour 18-14/12/2011: Arrivée à Nouméa
Nous sommes arrivés au port de Noumea aujourd’hui vers 14h30. C’est donc la fin d’une campagne de 17 jours et nous sommes tous contents d’être rentrés à terre. Le travail a été très intense pendant cette mission et nous rentrons dans nos laboratoires respectifs avec de nombreux échantillons et données qui vont nous tenir occupés pendant plusieurs mois. Nous espérons nous retrouver en 2012 pour rassembler toutes les données et réaliser une comparaison des deux campagnes. Avec l’ensemble des résultats nous pourrions envisager de faire des campagnes supplémentaires pour compléter le travail déjà réalisé. Pour finir nous voudrions remercier le commandant Jean-François Barazer et son équipage pour une campagne qui s’est très bien déroulée grâce à eux.
Tout l’équipement sur le pont, prêt à être débarqué.
Une dernière coupe de champagne pour fêter la fin de la campagne
La photo de groupe devant le phare Amédée, moins d’une heure avant notre arrive. Nous portons tous le T-shirt qui a été spécialement imprimé pour Nectalis pour fêter la dernière campagne de Francis sur l’Alis.
Le dos du T-shirt.
Jour 17-13/12/2011: Nec2023
Pendant le transit entre les 2 dernières stations nous avons travaillé sur les données obtenues pour rédiger le rapport final de la mission. Nous sommes arrivés sur la station d’échantillonnage vers 17h et nous espérions faire une dernière station sans accroc mais l’équipement en a décidé autrement. Ca a commencé par des problèmes de CTD, alors que la sonde était déjà dans l’eau, en surface, le logiciel n’a pas démarré, il y avait un problème de configuration. Apres une vingtaine de minutes nous avons pu charger une nouvelle configuration et la sonde a pu être descendue. Ensuite Martine a eu un certain nombre de problèmes sur ses filtrations d’eau de mer pour la collecte de phytoplancton. Les petits problèmes ont donc été résolus et nous avons terminé la station par 2 coups de chalut à micronecton qui ont ramené de belles quantités d’organismes. Etant donné qu’il s’agissait de la dernière station d’échantillonnage pour Francis, il a coupé l’extrémité du câble électro-porteur qui est utilisé pour descendre les instruments et les commander. C’est un joli souvenir pour la dernière mission de Francis à bord de l’Alis.
Martine dans le labo humide réalisant les filtrations de l’eau collectée par les bouteilles à différentes profondeurs entre 180m et la surface.
Martine, Christophe et Marc prélevant de l’eau sur les bouteilles de la dernière rosette de la mission
Le trophée que Francis va ramener de cette dernière campagne à bord de l’Alis.
Jour 16-12/12/2011: Nec2021 & Nec2022
Ce matin nous avons réalisé notre dernière station d’échantillonnage de jour. Elle était située dans le chenal entre la Grande Terre et les iles Loyautés au large des côtes de Maré. Les 2 dernières stations seront faites de nuit.
Les résultats de la sonde CTD qui est descendue à chaque station sur 500m de profondeur ont été mis en graphique montrant des profils de température, salinité, densité et fluorescence. Les résultats sont présentés pour les 19 premières stations. On observe une nette différence entre les profils de salinité, température et densité (qui dépend de la température et de la salinité) avant et après le 2 décembre qui correspond à la station 8. Au sud de la station 8, c'est-à-dire les stations 1 à 7 (du 28 novembre au 2 décembre), nous étions dans des eaux à température plus basse, salinité plus élevée et en conséquence densité plus forte. Au nord de la station 8, soit de la 8 à la 19 (du 2 au 10 décembre), les eaux étaient caractérisées par une température plus élevée, une salinité et une densité plus faibles. L’isotherme des 25°C est plus profond dans la partie nord de la zone. Malgré ces différences dans la structure verticale des eaux entre le nord et le sud, on n’observe pas de grande différence au niveau de la fluorescence qui est un indicateur du phytoplancton. Le maximum de fluorescence est localisé aux environs de 100m sur l’ensemble de la zone échantillonnée. Alors que nous nous dirigeons vers le sud, nous nous attendons à retrouver des eaux plus froides, plus salées et plus denses à partir de la station 20.
Profils de la surface à 200m de profondeur aux stations échantillonnées 1 à 19 entre le 28 novembre et le 10 décembre pendant Nectalis2. Temp= température (rouge=chaud, bleu=froid), Salinity=Salinité (rouge=plus salée, bleu=moins salée), Sigma Theta= densité de l’eau dépendant de la température et de la salinité (rouge=plus dense, bleu=moins dense), Fluorescence= indice de phytoplancton (rouge=forte valeur, bleu=faible valeur).
Trajet réalisé jusqu’au 10 décembre avec l’emplacement des stations de la campagne Nectalis2.
Jours 14 & 15 - 10/12/2011 &11/12/2011: Nec2019 & Nec2020
L’après-midi avant l’arrivée sur la station 20 a été consacrée à différentes réparations. En effet, nous avions des problèmes sur le TAPS depuis la station 18. L’une des fréquences sur les 6 a cessée de fonctionner à la remontée du TAPS ; elle était bloquée. Sur la station suivante elle est restée bloquée, nous avons donc décidé d’ouvrir l’appareil pour vérifier les circuits électroniques. Après une inspection minutieuse des circuits, aucune anomalie n’a pu être décelée ; du nettoyant de contacts électroniques a été pulvérisé en espérant que cela résolve le problème. L’appareil ne peut pas être testé, il nous faudra attendre la descente de la station 20 pour savoir si la fréquence fonctionne à nouveau. De nouvelles réparations ont également été nécessaires sur le filet à zooplancton sur lequel nous avons découvert 3 nouveaux trous circulaires dûs aux morsures des petits requins emporte-pièces.
Aujourd’hui dimanche l’équipe en cuisine nous a préparé un menu spécial : le bougna qui est le plat traditionnel mélanésien de Nouvelle-Calédonie. Il est normalement cuit dans un four creusé dans la terre, mais évidemment il a été cuisiné dans des marmites à bord. C’est un plat composé de poulet, taro, bananes plantains, patates douces et lait de coco que nous avons largement apprécié. A noter également que dans l’après-midi nous pouvions observer les côtes de Lifou l’une des 3 iles Loyautés.
Réparation du filet à zooplancton
Le bougna, plat traditionnel mélanésien de Nouvelle-Calédonie
Examen des entrailles électroniques du TAPS
Jour 13-09/12/2011: Nec2017 & Nec2018
Hier nous avons fait 2 stations d’échantillonnage, la première pendant la nuit avant le lever du jour et la deuxième toujours de nuit mais après le coucher du soleil. Le travail s’est bien passé sans problème particulier. Depuis le début de cette campagne nous avons remarque la présence de grandes quantités de larves de poissons chirurgiens (Acanthuridae) dans les captures du chalut pélagique. C’était particulièrement flagrant dans les captures de la nuit dernière. Les larves ont été capturées à la fois proche de la surface, vers 20m de profondeur, mais aussi plus profond à 100m. Nous pensons que c’est le résultat d’un pic de ponte de ces espèces récifales qui aurait pu avoir lieu il y a quelques semaines. Ces larves sont translucides sauf une bande verticale argentée autour de l’œil. De plus comme nous supposions qu’un grand nombre de petits individus s’échappaient à travers les mailles du chalut, le commandant a trouvé un système pour étirer les mailles du cul du chalut et nous avons ainsi capturé de nombreux spécimens de petite taille.
Aujourd’hui pendant le long transit entre les stations 18 et 19 nous avons pu observe des détections assez inhabituelles sur le sondeur acoustique. Elles ont la particularité d’être bien visibles aux fréquences 120 et 200 kHz alors qu’elles ne sont pas visibles sur le 38 et le 70 kHz. Nous ne savons pas à quels organismes nous avons affaire mais il pourrait s’agir d’organismes gélatineux tels que les méduses.
Etant donne que nous tenons le planning sans retard majeur nous avons décide de rajouter une station d’échantillonnage. En discutant avec le commandant, nous avons choisi d’ajouter cette station au sud de l’Ile des Pins, à environ une vingtaine de miles nautiques du mont sous-marin Antigonia. Cela nous permettra d’échantillonner dans les eaux plus froides du sud.
Image de l’echosondeur avec les 4 fréquences et un signal visible sur le 120 et le 200 kHz entre la surface et 100m, mais pas sur le 38 et le 70 kHz. Cela pourrait correspondre à la signature acoustique d’organismes gélatineux de type méduse.
Des larves de poissons chirurgiens (Acanthuridae) collectées à la surface (à gauche du plateau)
Des larves de poissons chirurgiens (Acanthuridae) collectées à la surface (à gauche du plateau)
Jour 12-08/12/2011: Nec2016 & Huon
La station de la nuit dernière a été particulièrement fructueuse pour la pêche au chalut à micronecton. Nous étions sur la pente à l’ouest de l’atoll de Huon et l’échosondeur montrait de forts échos vers 100m de profondeur. Nous avons réalisé 2 coups de chalut et nous avons obtenu une bonne quantité d’échantillons, principalement des petits poissons et des calamars ; nous avons également pris 4 petits requins emporte-pièces d’environ 30cm de long. Nous avions déjà capturé ces requins pendant Nectalis1 et on pense qu’ils nagent avec le micronecton et attendent qu’un grand prédateur comme un thon ou un marlin vienne se nourrir de petits poissons pour l’attaquer et mordre le thon en prenant un petit morceau. Quand les palangriers débarquent leur pêche on observe souvent des thons avec des marques de morsure fraiche. Dans le filet à zooplancton nous avons trouvé 2 grosses crevettes rouges. C’est assez inhabituel et on suppose que le trou circulaire de 2cm de diamètre dans l’un des filets a été fait par un requin emporte-pièce qui essayait de manger ces crevettes à moins qu’il essayait de s’échapper du filet (en début de mission on a en effet trouvé un petit requin dans l’un des filets).
Apres la station nous avons décidé de mouiller en face de l’ilot Huon pour une pause de quelques heures en guise de cadeau pour la retraite prochaine de Francis. Nectalis2 est sa dernière campagne à bord de l’Alis sur laquelle il a fait de nombreuses missions au cours de ses 30 ans de carrière. Huon est l’île la plus au nord dans la ZEE de Nouvelle-Calédonie ; c’est une île basse d’environ 50m de large sur 400m de long constituée de sable avec une végétation rampante sur le sol, pas d’arbres ni de buissons. Nous avons pris l’annexe pour aller à terre ou nous avons été accueillis par de nombreux oiseaux. Il y avait des œufs sur le sol, des poussins et des jeunes de tous les âges ainsi que des adultes de noddis et de fous. Du cote Est de l’île nous avons vu 5 tortues qui étaient coincees dans une grande flaque au pied du beachrock. Il y avait de nombreuses traces sur le sable et de larges trous ou elles avaient déposé leurs œufs pendant la nuit ; cependant quand elles sont redescendues de la plage la marée était basse et elles se sont retrouvées coincées. Nous avons aide l’une des tortues à traverser le beachrock et nous avons pu en voir 2 autres atteindre l’océan. Les autres attendaient la marée haute dans leur flaque par temps couvert avec de la pluie donc relativement épargnées par le soleil. Nous avons vraiment apprécié cette petite escapade à terre qui nous a permis d’observer la vie sauvage ; merci au commandant pour cet arrêt. A notre retour à bord nous attendait un menu spécialement concocté par l’équipe en cuisine pour fêter la dernière mission de Francis sur l’Alis. Nous avons quitté le mouillage après le déjeuner en direction de la prochaine station la nuit suivante.
Un trou dans le filet à zooplancton probablement causé par un requin emporte-pièce
Des petits requins emporte-pièces d’environ 30cm de long capturés avec le chalut à micronecton
Un gâteau spécial pour fêter la dernière mission de Francis sur l’Alis
Une tortue attendant que la marée monte pour traverser le beachrock sur l’ilot Huon
Des noddis adultes et des œufs déposés à même le sol
Un adulte et un jeune fou.
Jour 11-07/12/2011
Deux instruments permettent de mesurer les courants de l’océan à bord : le S-ADCP (fixé sur la coque) et le L-ADCP qui est descendu à chaque station sur 800 mètres de profondeur. Ces deux instruments sont complémentaires car le S-ADCP mesure les courants en continu le bateau en route mais celui-ci ne « voit » que les 150 premiers mètres de l’océan. Par contraste, le L-ADCP ne mesure que ponctuellement les courants (en station) mais il peut par contre donner une indication sur la structure des courants profonds jusqu’à 1000m qui n’est accessible par aucun autre moyen.
Les 2 premières figures ci-dessous présentent la structure des courants ainsi mesurés sur 1000 m par le L-ADCP à chaque station le long du trajet du bateau. On y voit deux sortes de courants, les courants de surface de l’océan qui sont généralement les plus intenses de la surface jusqu’à 200m. Ces courants sont générés par le vent en surface (cette couche sur laquelle agit le vent est appelée couche d’Ekman) et aussi par les contrastes de densité de l’eau de mer (déterminée par la température et la salinité) sous la surface (ce sont les effets dits géostrophiques).Une deuxième sorte de courant est visible sur deux stations durant notre trajet qui occupe de manière homogène les premiers 1000 mètres de l’océan et potentiellement une profondeur plus grande. Ces veines de courants sont particulièrement visibles dans le Pacifique Sud et sont appelés les « jets zonaux » car ils sont puissants et relativement homogènes sur la verticale et coulent principalement d’est en ouest. Ces jets viennent de l’éclatement des grands courants zonaux océaniques sur les îles (Fidji, Vanuatu, Nouvelle Calédonie) tel que le courant Sud équatorial qui prend naissance dans le Pacifique est et parcourt tout le Pacifique jusqu’aux côtes australiennes.
Le L-ADCP fonctionne, comme le S-ADCP en mesurant le changement de fréquence d’un signal émis et du signal de retour ayant frappé des particules en suspension dans l’océan (effet Doppler). De cette différence, on en déduit la vitesse du courant. Cela signifie aussi que, par principe de la mesure, on a accès à une quantité de particule dans l’eau en fonction de la profondeur. Selon le type d’ADCP que l’on utilise, on accède à des particules de plus ou moins grande taille. Ici, les instruments nous permettent de détecter des tailles allant du zooplancton au petit poisson. C’est ce qui est représenté sur la dernière figure ci-dessous. L’amplitude forte, en rouge, nous indique une concentration importante d’organismes tandis que les zones bleues indiquent de faibles concentrations. Ainsi, dans l’océan, on voit que c’est dans la couche de surface (0-100 m) et dans la couche de 400-600 mètres que se situe l’abondance maximale des organismes de cette taille. Ces mesures du L-ADCP, qui est d’abord un instrument dédié à la mesure des courants, sont tout à fait conformes aux mesures in situ de filet et aux mesures dédiées de sondeurs acoustiques qui indiquent une distribution similaire des organismes.
Les résultats du L-ADCP pour les 9 premiers jours de la campagne Nectalis2. Les deux premières figures montrent le courant zonal (est-ouest = rouge-bleu) et le courant méridien (nord-sud = rouge-bleu) de la surface jusqu'à 1000m de profondeur ; les 2 jets zonaux sont bien visibles sous forme de grandes bandes verticales bleue et jaune correspondant à un jet vers le nord-ouest à la station 5 le 29 novembre et un jet vers l’est à la station 13 le 5 décembre. La dernière figure montre l’amplitude qui est un indice de la quantité de petits organismes dans l’eau avec les fortes valeurs en rouge et les faibles valeurs en bleu.
Xavier, le chef mécanicien en train de fixer une deuxième batterie sur le bâtis des 2 L-ADCP (en jaune). L’un des L-ADCP regarde vers le bas, le deuxième regarde vers le haut. Nous avons eu récemment des problèmes de L-ADCP et après avoir ajouté une batterie et changé tous les câbles de connection, notre electronicien Francis s’est aperçu que c’est le L-ADCP lui-même qui ne fonctionnait pas. Nous avions heureusement un L-ADCP de rechange qui a été installé en espérant que tout fonctionne à la prochaine station.
Jour 10-06/12/2011: Nec2014
Le transit entre la station 13 hier soir et la station 14 ce matin a été relativement cours avec seulement 5 heures pour se reposer. Pendant cette station 14 nous avons doublé le travail. Nous avons en effet décidé de prendre des échantillons supplémentaires d’eau pour examiner le zooplancton de petite taille, il nous a donc fallu descendre les bouteilles 2 fois. Nous avons ensuite fait 2 descentes du filet a zooplancton pour récolter des échantillons pour un collègue. Nous avons également fait une descente sur 100m du petit filet à phytoplancton qui permet de récolter suffisamment de matière pour regarder la composition spécifique des cellules de phytoplancton. De plus nous avons eu un problème avec le LADCP qui n’a pas enregistré les données. Francis notre électronicien a suspecté un problème de liaison avec la batterie, il a donc nettoyé les connecteurs avant de refaire une descente. Malheureusement la deuxième descente n’a pas donné plus d’information. Francis a refait un nettoyage plus complet de l’ensemble des éléments et nous avons réalisé une troisième descente après les 2 coups de chalut. Nous avons enfin pu obtenir des données pour cette troisième descente cependant pour plus de sûreté une deuxième batterie va être installée sur le bâtis ; donc encore du travail en perspective. Cette station marathon a duré 9 heures c'est-à-dire environ le double du temps habituel ; nous avons décidé de retarder de 3 heures la station suivante pour permettre à tous de se reposer.
Nous voudrions aussi évoquer l’excellent travail réalisé par notre équipe en cuisine : Jacques et Nicolas. Les repas sont un moment très important de la vie à bord. Le travail est parfois difficile avec des horaires irréguliers et la météo n’arrange parfois pas les choses. Rassembler tout le monde autour de la table pour une pause et un bon repas est toujours un moment convivial très attendu. Nous ne leur rendons pas le travail facile lorsque la station tombe au moment du repas ou lorsque certains doivent travailler et que d’autres mangent, cependant l’équipe cuisine a toujours le sourire et nous prépare jour après jour d’excellents repas avec un service impeccable. Merci a vous Jacques et Nicolas.
Jacques et Nicolas, l’équipe de la cuisine
A l’heure du repas
La mise à l’eau du petit filet à phytoplancton
Francis et Christophe au chevet du LADCP
Les trainées de couleur marron laissées par les efflorescences de Trichodesmium à la surface de l’eau. Cette photo a été prise au large de Nouméa en 2003.
Les résultats de l’ADCP de coque (courants et indice de biomasse des proies) et du thermosalinographe de coque (température et salinité) sur le parcours de Nectalis2.
Jour 9-05/12/2011: Nec2012 & Nec2013
Hier nous avons observé à la surface de l’eau des trainées de couleur marron; il s’agissait d’une efflorescence de Trichodesmium. Ces organismes sont des cyanobactéries, c'est-à-dire des bactéries possédant des pigments photosynthétiques comme les algues. Tous les organismes qui font de la photosynthèse ont besoin d’azote. Ces bactéries ont la particularité d’absorber l’azote de l’air dissous dans l’eau (processus de diazotrophie) et qui existe en grande quantité alors que la plupart des organismes phytoplanctoniques doivent absorber l’azote sous forme minérale comme le nitrate ou l’ammonium dont les faibles concentrations limitent parfois leur développement comme dans les zones oligotrophes (eaux très pauvres). Les Trichodesmium se développent surtout dans les eaux chaudes comme dans la zone ou nous sommes actuellement à cette saison.
La première station du jour a commencé ce matin à 5h. Nous avons fait la série de mesures habituelles. Grâce aux sondes, nous avons obtenu un profil de fluorescence sur la profondeur qui nous donne une indication de la quantité de phytoplancton présent dans l’eau de mer et de la profondeur de son maximum. Ce matin le maximum était peu profond, à 60m alors que sur les stations précédentes il était en général vers les 100-110m. Le maximum de fluorescence n’a jamais été observé en surface durant cette campagne. Pas d’enrichissement en surface et un maximum de fluorescence profond marqué sont caractéristiques des eaux oligotrophes, c’est à dire des eaux très pauvres. Les résultats préliminaires ne permettent pas d’expliquer ces variations de profondeur du maximum qui ne semble pas être contrôlé par le mouvement vertical des masses d’eaux qui est habituellement la première source d’enrichissement dans l’océan.
Nous avons terminé le travail de station par 2 coups de chalut. Le premier très profond à 450m et le second vers 25-30 m. Le second coup de chalut fut un peu décevant car nous n’avons ramené que des organismes gélatineux. Il y avait tout de même un unique poisson qui n’est pas anodin car ce petit poisson d’environ 1,5 cm est rarement observé. Il est très intéressant puisqu’il s’agit sans doute d’une larve de thon. Un examen plus détaillé de la larve en laboratoire permettra de confirmer s’il s’agit bien d’un thon et peut être d’en déterminer précisément l’espèce.
Fluorescence (indication des quantités de phytoplancton) en fonction de la profondeur pour les stations 10 (noir), 11 (bleu) et 12 (rouge) montrant le maximum profond caractéristique des eaux très pauvres (oligotrophes).
La larve de poisson trouvée ce matin dans le chalut effectué à 30m de profondeur. Il s’agit peut-être d’une larve de thon, elle fait environ 1,5cm.
Jour 8-04/12/2011: Nec2011
Alors que les stations se succèdent, nous poursuivons notre route dans la partie nord de la zone économique exclusive de Nouvelle Calédonie où nous naviguons dans des eaux de plus de 28 degrés. Les données de l’ADCP de coque, le profileur de courant qui permet également de calculer un indice de biomasse des proies et les données du thermosalinographe de coque qui enregistre la température et la salinité de l’eau en continu ont été analysées. Nous avons plus de données par rapport aux informations du journal de bord des 28 et 29 novembre qui permettent de mieux comprendre l’océanographie de la zone. Les cartes de température et de salinité montrent clairement la présence d’une masse d’eau plus froide et plus salées au sud de la zone alors que la partie nord est occupée par une masse d’eau plus chaude et moins salée. Entre les deux nous observons une zone de transition avec une température et une salinité intermédiaires où se rencontrent les 2 masses d’eau qui sont légèrement mélangées par les courants tourbillonnaires dans cette zone de transition. L’indice de biomasse des proies suit globalement la température et la salinité avec de plus grandes quantités de proies dans les eaux plus froides et plus salées du sud.
Jour 7-03/12/2011: Nec2HS1 & Nec2010
Nous sommes passés aujourd’hui au nord du large banc des Chesterfield pour revenir vers la Grande Terre de Nouvelle-Calédonie. Au cours de Nectalis1 lorsque nous avions navigué dans cette zone nous avions constaté sur le sondeur acoustique la présence d’organismes en grande quantité sur les pentes des Chesterfield. Ces organismes se trouvaient, en journée, à une profondeur de 220m, ce qui était inhabituel par rapport aux détections classiques de jour pendant lequel l’ensemble des organismes est à une profondeur de 500m environ. Le coup de chalut que nous avions effectué sur ces détections pendant Nectalis1 nous a permis d’observer une espèce de poisson hachette très particulière car nous n’en avons pas trouvé de description dans la littérature scientifique ce qui laisse supposer que c’est une espèce nouvelle. Les spécimens faisaient environ 4 à 5 cm de long. Nous avons donc voulu vérifier pendant Nectalis2 si nous retrouvions ces détections très particulières. Ce matin en arrivant sur la pente Est du banc nous avons retrouvé ces détections, toujours aussi fortes et situées cette fois sur les 300m de profondeur. Nous avons donc mis le chalut à l’eau et nous avons retrouvé à nouveau nos poissons hachette. Le contenu du chalut était quasiment composé uniquement de cette espèce. Cette fois les spécimens étaient de plus petite taille, de 1 à 2 cm de long, mais la quantité pêchée était plus importante. De nouvelles recherches dans la littérature scientifique et des contacts avec les spécialistes vont nous permettre de confirmer ou pas si cette espèce est nouvelle ; si c’est le cas, le grand nombre d’échantillons récoltés devrait nous permettre de faire une description complète de cette espèce.
Echogramme de la pente Est du banc des Chesterfield montrant les accumulations classiques d’organismes à plus de 500 m de profondeur et sous la surface en journée. Plus inhabituels sont les fortes densités observées vers 300m.
Valerie Allain et la pêche du jour.
La pêche du jour triée avec à gauche de grandes quantités du poisson hachette Polyipnus sp. dont le nom d’espèce n’a pas pu être déterminé.
Jours 5 et 6 -01/12/2011-02/12/2011: Nec2007 & Nec2008 & Nec2009
Au cours de la campagne nous étudions notamment le zooplancton qui est composé de petits organismes tels que les petits crustacés. Le krill trouvé en Antarctique, par exemple, et dont se nourrissent les baleines fait partie du zooplancton. Le zooplancton se nourrit de phytoplancton et de bactéries, il est donc situé au deuxième niveau dans le réseau alimentaire. La zone échantillonnée pendant Nectalis est situé dans une région très pauvre et globalement les collectes ont jusqu'à présent été très faibles. Cependant le zooplancton collecté avec le filet à nappes était particulièrement riche à la station 7. Comme pour l’ensemble des stations c’est la couche de surface (0-100m) qui présente le plus d’organismes. Le zooplancton est également examiné grâce au TAPS (Tracor Acoustic Profiler Sensor) qui est un engin acoustique que l’on descend à 200m de profondeur. Le TAPS fournit des distributions verticales du zooplancton par classes de tailles (rayons équivalents sphériques), que l’on peut mettre en parallèle avec les paramètres d’environnement comme la fluorescence (indice de phytoplancton) ou la température.
Des résultats du TAPS montrant la distribution selon la profondeur (de 0 à -200m) du zooplancton de petite, moyenne et grande taille pour une station de jour et une station de nuit. En parallèle sont indiqués la fluorescence qui est un indice du phytoplancton dont se nourrit une partir du zooplancton (surtout celui de petite taille) et la température. On constate que le petit zooplancton est plutôt en surface, le zooplancton de taille moyenne est au dessus du maximum de fluorescence et le zooplancton de grande taille est au niveau du pic de fluorescence de jour mais un peu au-dessus de nuit.
Marc Pagano utilisant du matériel High Tech pour transférer le zooplancton dans des flacons.
Quelques larves de poissons de récifs capturés au large : poisson papillon (Chaetodontidae) de 1 cm en haut à gauche, poisson coffre (Ostraciidae) en bas à droite.
Quelques organismes du zooplancton: de petits crustacés.
Jour 4 -30/11/2011:Station d'échantillonage Nec2006
Les nuits se suivent et se ressemblent un peu. Nous avons de nouveau eu des problèmes de chalutage. Comme hier les panneaux se sont emmêlés. Le commandant pense que nous allions un peu trop vite, au-dessus de 3.5 nœuds et au moment de ralentir pour mettre le treuil en route pour ramener le chalut, les panneaux se sont rapprochés l’un de l’autre et se sont emmêlés. Cependant alors que hier nous avions seulement 120m de câble sortis, cette nuit nous avions 600m de câble dehors puisque nous ciblions des détections à 90m de profondeur. Le temps d’enrouler toute la longueur de câble le chalut a eu largement le temps de tourner sur lui-même. Il a fallu cette fois plus de 2heures30 à l’équipage pour ramener chalut et panneaux à bord avec un vent de 20 nœuds et une mer formée qui n’ont pas facilité le travail. Les câbles ont été refaits le lendemain. La capture du chalut n’était pas très grosse mais composée principalement de calamars dont 2 gros spécimens.
Jonathan l’un des membres d’équipage en train de réaliser une épissure sur l’un des câbles.
Edwin, Féfé et Steve travaillant sur l’autre câble
Les calamars capturés pendant le coup de chalut de la nuit avec 2 Stenoteuthis oualaniensis d’environ 20 cm.
Jour 3 - 29/11/2011: Stations d'échantillonage Nec2004 & Nec2005
Nous avons réalisé aujourd’hui notre dernière station au large de la côte ouest de la Grande Terre. Débutée au lever du jour il nous aura fallu environ 5 heures pour faire une descente du profileur de courants (LADCP) à 800m, une descente à 500m du capteur de temperature/salinite/profondeur avec les 9 bouteilles prélevant l’eau des analyses chimiques et phytoplanctoniques, une descente du filet à zooplancton à 600m, une descente du profileur acoustique de zooplancton (TAPS) à 200m et enfin 2 coups de chalut à 490m et à 30 m de profondeur. Le deuxième coup de chalut en surface nous a permis de prélever des larves de poissons de récif qui grandissent au large avant de revenir se fixer sur les récifs. Nous avons ensuite quitté la station pour partir plein ouest en direction du banc de Lansdowne ou nous allons faire une station au-dessus de fonds de 1000m avant de passer sur les hauts fonds du banc indique à 40m sur les cartes. Les données enregistrées en continu par les appareils installés sur la coque ont commencées à être analysées, nous avons notamment quelques informations sur les quantités de proies et sur les courants.
Un poisson lime (Monacanthidae) de 4 cm.
Un poisson-soldat (Priacanthidae) de 3 cm.
Le signal du profileur de coque (SADCP) permettant de calculer un indice de biomasse (quantité) de proies et la direction et la force des courants. Les données présentées sont une moyenne sur les 100 premiers mètres et pour l’indice de biomasse l’effet jour-nuit a été supprimé. On constate donc que les quantités de proies sont plus importantes dans la zone sud qui correspond aux eaux plus froides (voir le journal de bord du 28/11/2011). Par ailleurs les courants montrent clairement le courant nommé Alis qui est dirigé vers le sud-est à l’opposé du vent dominant avec cependant des oscillations.
La station de la nuit dernière (Nec2005) a été mouvementée. Nous avons commencé le travail par le chalutage et nous ciblions la couche de surface vers 25m de profondeur. Au moment de la mise à l’eau du chalut nous avons observé sur le sondeur que la détection montait encore plus vers la surface. En voulant remonter le chalut pour capturer les organismes le commandant s’est rapidement aperçu qu’il y avait un problème au niveau du comportement de l’engin visible grâce aux capteurs de profondeur et d’ouverture de la gueule du chalut. Le câble a été ramené à bord et nous avons constaté les dégâts·: les 2 lourds panneaux métalliques qui servent à maintenir le chalut largement ouvert s’étaient emmêlés. Nous avions eu un problème identique lors du dernier coup de chalut de Nectalis1. L’équipage a pu rapidement démêler les câbles et ramener le chalut à bord. Nous avons réalisé un deuxième coup de chalut juste après et le reste des manipulations. Les câbles du chalut ont été raccourcis le lendemain pour enlever l’extrémité qui avait été vrillée. Un grand coup de chapeau à l’équipage qui a parfaitement gérer l’incident avec une grande rapidité.
L’un des panneaux est à bord (à droite sur la photo), le deuxième panneau emmêlé traîne dans l’eau derrière. On voit le câble qui a été vrillé et qui est en train d’être démêlé.
Les 2 panneaux sont maintenant à bord, il faut démêler les câbles du chalut qui ont tourné.
Jour 2 - 28/11/2011: Stations d'échantillonages Nec2002 et Nec2003
A la fin du deuxième jour de mission nous avons déjà réalisé 3 stations. Nous avons en effet ajouté une station supplémentaire à mi-parcours des stations 1 et 2. Une vérification des données satellites de température avant le départ nous a indiqué que le front entre les eaux froides du sud et les eaux chaudes du nord se situait environ à la latitude de 21°40S. Ayant prévu peu de stations dans le sud nous avons décidé d’en ajouter une. Les trois premières stations se sont donc enchaînées avec 6 heures de transit entre chaque station et 6 heures de travail par station. Nous avons effectivement traversé le front entre les masses d’eau entre les stations 2 et 3 et on a pu enregistrer une différence de température de surface de 2 degrés Celsius en passant de 24.3 à 26.3 degrés. La station 3 s’est effectuée de jour alors que le micronecton est en profondeur. Il nous a donc fallu envoyer le chalut sur les 500m de profondeur pour espérer prendre quelques spécimens. La récolte ne fut pas très importante mais des traits de chalut à ces profondeurs amènent toujours leur lot de poissons étranges.
La salinité (à gauche) et la température (à droite) le long de notre trajet. On voit nettement le contraste entre les eaux du sud plus salées (jaune-vert) et froides (bleu) et les eaux du nord dessalées (bleu) et chaudes (rouge) et le passage du front entre les stations 2 et 3.
La récolte du chalut en station 3 à la profondeur de 500m.
La même récolte après tri: organismes gélatineux, crevettes et crustacés, calamars, poissons hachette (argentés), divers poissons profonds, quelques poissons de récif (poisson lime et poisson ballon) et larves leptocéphales (larves d’anguilles, de murènes...).
Un étrange poisson (Opisthoproctidae) capturé à 500m de profondeur. Il fait environ 4 cm et a un museau totalement transparent.
Jour 1 - 27/11/2011: station d'échantillonage Nec2001
Notre départ ce dimanche matin a été marqué par la venue de Jean Michel Boré du service de communication de l’IRD qui est venu faire une interview de Francis Gallois dont c’est la dernière mission sur l’Alis. Le temps de quelques prises de vues et nous avons appareillé vers 8:15. Nous avons profité des conditions relativement calmes dans le lagon pour effectuer un exercice de sécurité : enfiler les combinaisons de survie qui se transforment rapidement en sauna. Nous sommes arrives comme prévu à la station Nec2001 vers midi. Pour cette première station nous avons effectué l’ensemble des travaux prévus: CTD, LADCP, TAPS, filet à zooplancton et 2 traits de chalut à micronecton. Comme à l’accoutumé cette station de démarrage a mis un peu plus de temps que prévu avec quelques petits aléas : une manille qui manque, des câbles inversés, des systèmes qui marchaient parfaitement à terre et qui ne fonctionnent plus en mer, etc… Il nous a donc fallu 7h au lieu des 6h planifiées pour mener à bien toutes nos manipulations qui dans l’ensemble ont très bien fonctionné. Equipage et équipe scientifique reprennent peu à peu leurs marques
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Jean-Michel Bore realisant une interview de Francis Gallois just avant le depart de Nectalis2
Marc Pagano et Christophe Menkes se soumettant aux exercises de securite
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